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Plaidoyer pour les aidants

Newsletter | 26 novembre 2018

Ceux que l’on nomme les « proches aidants » ou « aidants familiaux » sont aujourd’hui le premier rempart contre la perte d’autonomie et l’isolement. Selon le Baromètre 2017 de la Fondation April, ils seraient près de 11 millions. Ce rôle d’aidant est néanmoins difficile à endosser pour certains, d’autant que la société aura mis du temps à le reconnaître et le valoriser, alors qu’il est indispensable.

Il aura fallu attendre la loi ASV et le 1er janvier 2016 pour que le statut de proche aidant soit reconnu officiellement et défini par le législateur. Selon le code de l’action sociale et des familles, « est considéré comme proche aidant d’une personne âgée son conjoint, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité ou son concubin, un parent ou un allié, définis comme aidants familiaux, ou une personne résidant avec elle ou entretenant avec elle des liens étroits et stables, qui lui vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne. »

Ajoutons à cette définition, un autre élément de cadrage, financier cette fois. Selon les données publiées par l’équipe du Laboratoire d’économie et de gestion des organisations de santé de l’Université Paris-Dauphine dans le cadre de l’étude Share, la contribution de ceux qui accompagnent leurs proches dépendants permettrait à la société d’économiser environ 11 milliards d’euros par an. L’aidant familial joue donc un rôle essentiel dans notre société. Il contribue grandement au maintien à domicile de l’aidé, compense le manque ou l’inadaptation de structures d’accueil et réduit les coûts de prise en charge. Mais il y a tout de même un coût, celui de la dégradation de la qualité de vie du proche aidant, qui ne doit pas devenir la variable d’ajustement d’un système de prise en charge inabouti.

En effet, concilier vie professionnelle et activité d’aidant peut s’avérer être une tâche ardue, d’autant qu’un aidant s’occupe d’un proche en moyenne 16h par semaine selon le Baromètre d’OpinionWay pour la mutuelle Carac d’avril 2017, et que beaucoup posent régulièrement des jours de congés et de RTT pour aider au mieux leurs proches dépendants. Du moins pour ceux qui travaillent, car la moitié des proches aidants de France ont entre 50 et 74 ans selon le même Baromètre évoqué plus haut. La situation d’accompagnant pouvant peser sur le moral et la santé, on constate un réel épuisement des proches aidants. Encore aujourd’hui, plus de 7 aidants sur 10 n’ont pas de soutien venant d’un intervenant professionnel.

Pis encore, ils y vont de leur poche. Toujours selon le baromètre OpinionWay/Carac, 66% des aidants familiaux prennent en charge financièrement des frais à hauteur de 2 049 € par an en moyenne. Dans le détail, il s’agit de frais de transport, d’aménagement du domicile de la personne aidée et de reste à charge, d’achats de médicaments non remboursés et de matériel ou l’embauche d’une aide professionnelle ou ménagère. 7 aidants sur 10 avouent que leur rôle a de lourdes répercussions financières sur leurs revenus au quotidien…

Alors que faire ? Ces dernières années, le législateur a cherché à soulager ces aidants sur plusieurs aspects. En effet, la loi ASV, outre la définition du proche aidant, a rendu effectif le droit au répit, en mettant en place un soutien financier d’un montant maximum de 500€ par an pour permettre aux personnes dépendantes de bénéficier d’une structure d’hébergement temporaire pour quelques heures ou plusieurs jours ou un relais à domicile. Ce dispositif est néanmoins très conditionné, ce qui limite son utilisation…

Le décret d’application qui a suivi la loi vise quant à lui une « meilleure articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale », réformant ainsi le congé de soutien familial et introduisant le « congé proche aidant », ouvrant droit à un congé sans solde de 3 mois renouvelable et pouvant être transformé en activité à temps partiel. Le législateur a donc pris quelques dispositions concernant ces acteurs informels du secteur, sans supprimer la problématique financière persistante, les jours de congés n’étant pas payés. Un aidant ne peut pas toujours se permettre de diminuer ses revenus…

L’accompagnement d’une personne en perte d’autonomie tient donc sur la coordination entre le proche aidant et les professionnels médicaux ou de l’aide à domicile. C’est l’aidant familial qui bien souvent sert de pivot entre tous les acteurs, il est donc bénéfique de l’associer à toutes les étapes de prise en charge de la personne aidée. C’est ainsi que travaille Onela, en articulation et en complémentarité avec l’intervention de l’aidant, chacun dans son rôle. Car s’il peut être considéré comme naturel d’aider ses proches en situation de perte d’autonomie, effectuer des soins intimes, des soins techniques, une toilette ou encore de l’habillage peut changer le rapport entre le proche aidant et la personne qu’il accompagne. C’est là que les professionnels viennent décharger l’aidant des tâches complexes et préserver sa relation familiale avec la personne aidée. Ils facilitent l’organisation du maintien à domicile et permettent également à l’aidant de pouvoir s’accorder des temps de répit, tout en étant rassuré et déculpabilisé afin de profiter de chaque moment avec son proche sans penser à l’organisation des soins du jour.

Les professionnels secondent donc les aidants, leur apportent un soutien indispensable, tout en les associant étroitement à la prestation pour garantir la meilleure prise en charge possible dans la durée, offrir des services de qualité et favoriser la bientraitance. Mais tout cela n’est aujourd’hui pas suffisant pour soulager les aidants. Dans les réflexions prospectives liées au vieillissement à venir, les solutions à imaginer ne pourront donc pas faire l’impasse sur les proches aidants, qui n’ont pas vocation à être éternellement la variable d’ajustement des défaillances des systèmes de prise en charge.