Nos actualités

Peut-on raisonnablement augmenter les cotisations sociales des plus de 70 ans ?

Newsletter | 25 octobre 2019

Le volte-face spectaculaire du gouvernement du mois de septembre a de quoi surprendre. Passer en quelques jours d’une mesure aussi inattendue qu’impopulaire : supprimer l’exonération de cotisations sociales des plus de 70 ans quand ils ont recours à une aide à domicile, à sa suppression, a laissé les acteurs du secteur partagés entre l’inquiétude et le soulagement.

L’annonce de cette suppression dans le cadre de la préparation du PLFSS est tombée comme un cheveu sur la soupe. Même si, pour être exact, il s’agissait de modifier le type de bénéficiaire de la mesure : ne plus retenir le critère de l’âge pour cette exonération quasi-totale de cotisations patronales, mais celui de la dépendance, l’intention, le timing et les arguments utilisés ont réussi à faire l’unanimité contre la mesure. Sans parler de la méthode, sans aucune concertation.

Première erreur : l’intention. Aborder le sujet une fois de plus sous l’angle d’une niche fiscale est, par son caractère réducteur, la meilleure façon de braquer les professionnels et les familles. La mesure a été créé en 1987, elle est la plus ancienne des mesures fiscales et sociales d’aide au secteur des personnes âgées. Impossible d’y toucher sans avoir un débat préalable sur le financement du grand âge et de l’aide à domicile.

Deuxième erreur : le timing. Alors que les besoins de l’aide à domicile sont estimés à plusieurs millions d’euros, la mesure devait générer une économie de 310 millions d’euros en 2020 et 360 les années suivantes. Ce n’est donc pas que d’une réaffectation dont il s’agissait mais bien d’une économie nette. Une économie difficile à justifier au moment où l’on attend des pouvoirs publics un surcroit de financement pour le secteur en préparation de la loi de 2020, et au moment où l’on met l’accent sur l’importance de la prévention à laquelle cette mesure participe.

Troisième erreur : les arguments utilisés. L’exemple du jardinier payé sur fonds publics utilisé par la porte-parole du gouvernement est, là encore, aussi biaisé que maladroit. Ces services sont marginaux, 4% des séniors y ont recours selon une étude de la Drees, contre 43% à une aide à domicile pour des travaux ménagers et 19% pour la toilette et l’habillement. Prendre l’exception pour supprimer la règle relève d’une dialectique qui n’aura pas floué grand monde.

Certes, rien n’empêche dans l’absolu de revoir telle ou telle mesure pensée il y a plus de 30 ans avant que ne soient prises toute une série d’autres mesures contribuant à solvabiliser le recours des personnes âgés à l’aide à domicile : réductions et crédits d’impôts, APA, CESU, etc. Mais, rien ne peut en réalité bouger sans proposer au préalable une vision globale de la politique du vieillissement en général, et de son système de financement en particulier.

Le gouvernement par la voix de son premier ministre aura au moins eu l’intelligence politique de faire machine arrière devant le tollé provoqué par l’annonce de la mesure, qui faisait suite à plusieurs rabots du pouvoir d’achat des personnes âgées (sous indexation de pensions, augmentation de la CSG) et pour une économie discutable, qui aurait eu, de surcroît, comme effet de contracter l’emploi dans le secteur, de basculer une partie des services vers le travail non déclaré et de fragiliser un peu plus les SAAD. In fine, soulagement devant ce retrait, mais vigilance sur les échéances législatives à venir. Rien n’est gagné pour l’aide à domicile.